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Avez-vous déjà entendu parlé de la monarchie roumaine ?
Il faut dire que cette période a disparu de l’histoire occidentale… Pourtant, cent ans en arrière, toute l’Europe avait les yeux fixés sur les couples royaux qui étaient aussi populaires comme Kate et William. La Roumanie a connu une période de prospérité le temps d’une monarchie qui s’étendit de 1881 à 1947 et qui laissa le temps à quatre rois de monter sur le trône.
Laissez-moi donc, chers lecteurs, vous raconter l’histoire de la monarchie roumaine.
Tout débuta durant la deuxième moitié du XIXe siècle, l’Europe connaissait une vague d’unification, les peuples manquent de sécurité face aux idées expansionnistes et à la colonisation venant de l’occident. C’est d’abord l’Italie qui parvient à constituer un royaume en 1861, puis l’empire d’Allemagne qui se constitue en 1871 sur les cendres de l’empire français.
Ces changements modifièrent l’esprit du peuple roumain, vivant alors dans des États partagés entre grandes puissances, en particulier la principauté de Roumanie, vassale de l’empire Ottoman et la Transylvanie aux mains de l’empire Austro-hongrois. Il faudra attendre la guerre Russo-turque (1877-1878), les Russes ayant pour mission la libération des peuples slaves et la création d’une confédération panslave. Vaincus, les Ottomans sont contraints de déclarer la Roumanie comme un État souverain.
Carol 1er : le bâtisseur
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Le roi du nouveau pays est très vite désigné, ce sera Carol 1er, qui était déjà prince de Roumanie depuis 1866. A l’origine, les roumains cherchaient un monarque étranger pour ne pas frustrer les régions. Leur choix s'est porté sur ce prince pauvre et discret : Karl von Hohenzollern. Son règne fut très vite perçu comme la période la plus prospère de l’histoire de la Roumanie.
Le changement était radical : un occidental allemand, catholique et apparenté à aucun parti. Il est venu seul, sans reine à ses côtés. Le roi traversa donc l’Europe pour trouver l’amour de sa vie et rencontra Elizabeth avec qui il eut sûrement le mariage royal le moins bien assorti de l’histoire car Carol était calculateur et minutieux alors que sa femme était une rêveuse qui détestait être sérieuse. Mais le couple devint populaire pour leurs caractères opposés qui donnaient des scènes pleines d’humour et de tendresse.
Voyant que tout était à faire, il passa son temps à amener un prestige à sa dynastie. Carol 1er fut très vite connu pour sa personnalité froide et méticuleuse. Il a dévoué toute sa vie à l’indépendance de son pays et à la construction d’une dynastie aimée du peuple. De plus, Carol 1er fit le choix de moderniser son pays en développant l’éducation avec la création de la première université roumaine, en améliorant l’infrastructure comme la construction du premier pont sur le Danube et en améliorant l’image royale en bâtissant le château de Peles, un chef d’œuvre architectural.
Le roi était fier de ce qu’il a accompli pour son peuple et souhaitait continuer ses projets, mais un vent glacial s’abattit brusquement… Le vent qui annonce l’approche de la première guerre mondiale. En 1914, Carol 1er se retrouve au centre des tensions internationales. Son cousin, Guillaume II, le Kaiser d’Allemagne, voudrait qu’il entre avec lui dans une guerre qui s’annonce, mais l’autre camp demande aussi le soutien de la Roumanie. Carol se retrouve face à un dilemme : trahir sa famille allemande ou les soutenir dans une guerre qui ruinerai son économie ? Le roi est sensible et ne supporte pas le choix qu’on lui impose, épuisé il s’éteint au commencement de la grande guerre le 27 septembre 1914.
Ferdinand 1er : le loyal
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Le couple royal n’ayant pas eu de prince héritier, ce fut le neveu du roi qui reprit le flambeau sous le nom de Ferdinand 1er.
Son couronnement se fera dans une situation difficile : la guerre totale qui ravage toute l’Europe. Ferdinand a une culture moins allemande que son oncle, mais déclarer la guerre à sa famille allemande est un choix qui lui déchire le cœur. C’est pourtant ce qu’il fera car les roumains veulent une guerre et le roi n’aura pas le choix de combattre son ancien peuple.
La guerre ne se déroule pas à son avantage et les puissances centrales le poussent à déclarer l’armistice le 10 février 1918. Ferdinand était un homme de paix et s’impliqua pour négocier et ne pas subir les conditions imposées par l’Allemagne et l’Autriche-hongrie. Son dévouement fut salué par les roumains qui l’appelèrent très vite « Ferdinand Le Loyal ». Très aimé par son peuple, il travailla pendant son règne à garantir la paix et l’unité de la Roumanie.
Vers la fin de sa vie, dans les années 1920, Ferdinand fit face à un nouveau problème : son fils Carol II. Des scandales visant son fils éclatèrent sur tout le continent, il vivait sans aucune règle, dépensait l'argent sans limite et ne soignait pas son image. Le peuple roumain et la famille royale elle-même n'ont pas apprécié ce comportement. Ce qui mena Ferdinand à déshériter son fils et mettre son petit-fils, Mihai, à la succession. Peu de temps après, en 1927, le deuxième roi du pays s’éteignit à son tour.
Nicolas de Roumanie : le régent
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Mihai, ou Michel 1er en France, n’avait que 6 ans quand il monta sur le trône. Son jeune âge l’empêchant de diriger un pays, un Conseil de régence se mit en place, formé par le prince Nicolas de Roumanie (son oncle), le patriarche Miron Cristea et le président de la Cour de cassation George Buzdugan. Nicolas supportait mal son rôle politique, le caractérisant de fardeau. Il le laissera glisser aux mains des pouvoirs politiques de l’époque. Cette erreur amènera Carol II, alors exilé au Brésil, à revenir prendre le trône qu’on lui a volé …
Carol II : le parasite
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Carol II a connu plusieurs années de flânerie pendant son exil et a souvent provoqué l’indignation. A titre d’exemple, il a simulé qu’il était priapique (maladie provoquant une érection du pénis continue) pour attirer les femmes.
En 1930, voyant que sa situation financière se dégrade et que son pays tient à sa tête son fils de 9 ans, il tente à nouveau de devenir roi de Roumanie. Il arrive à convaincre le parti au pouvoir de le soutenir et obtient l’abrogation de son abdication. Le 8 Juin, Carol II est désigné roi par les parlementaires. Très vite, il trouve le régime trop mou et décide de s’accorder plus de pouvoirs. Il joue de la division des partis et la montée des extrêmes pour imposer son autoritarisme, ce qui lui vaudra les critiques de l’église et de l’armée.
Sa soif de pouvoir l’amène à supprimer les titres de Nicolas de Roumanie et lui imposer l’exil en 1937.
Les instabilités grandissantes en Europe le confortent et en 1938 il décide de rompre son alliance avec la Tchécoslovaquie et la Yougoslavie et impose à son pays la « dictature Carliste » en s’accordant beaucoup plus de pouvoirs. La guerre éclate en 1939 et son travail consistera à rester neutre en commençant par accueillir le gouvernement exilé et les troupes de la Pologne envahie.
Hitler s’agacera de son comportement en déclarant : « la Roumanie est comme les États-Unis : elle est officiellement neutre, mais en réalité elle nous livre une guerre froide ». Sa sécurité disparaît quand la France est envahie. L’Allemagne lui lance un ultimatum l’obligeant à céder la plupart de ses territoires à la Hongrie et à l’URSS, ce qu’il fera.
Ce démembrement sera inexcusable et la Roumanie vit en Carol II toute la honte du pays.
Le roi est victime d’un coup d’Etat en septembre 1940, ce qui le contraint d’abdiquer au profit de Michel 1er. Ion Antonescu, homme d’extrême droite à l’origine de soulèvement, s’auto-proclame « Conducător » (« guide »). Ainsi s’envole du pays une nouvelle part de démocratie… Carol II de son côté s’enfuira du pays dans un train sous le feu des mitrailleuses par le nouveau régime.
Michel 1er : le dernier roi
Nous sommes en 1940 et Michel a maintenant 18 ans. Le jeune homme se retrouve à nouveau roi malgré lui dans une dictature des plus opprimantes. Il n’a aucun pouvoir, et ne fait qu’obéir au maréchal Antonescu. Il déclarera : « J'ai appris à ne pas dire ce que je pense et à sourire à ceux que je hais le plus ». Il passera son temps à protéger les derniers démocrates encore en vie et à construire une résistance. Michel attendra l’entrée de l’armée soviétique dans le pays pour monter un coup d’état avec les forces alliées pour faire emprisonner le dictateur. Cela fait, il se déclare ami des Alliés et déclare la guerre au Reich.
Mais l'histoire ne s’arrête pas là et la période la plus sombre de l’histoire roumaine fit son apparition…
L’URSS occupe le pays comme un ennemi vaincu et soutient les forces communistes du pays ce qui amènera un nouveau coup d’État le 6 mars 1947, forçant le roi à nommer un gouvernement pro-soviétique. Le coup de grâce sera donné le 30 décembre : voyant les étudiants révoltés menacés d’être exécutés, Michel 1er abdique et la République socialiste de Roumanie est proclamée ce qui mènera aux évènements sanglants que nous connaissons aujourd’hui.
Après un demi-siècle d’attente, la famille royale a finalement pu récupérer ses biens en 1997 ainsi qu’une liberté de séjour dans le pays et un titre d’ancien chef d’État pour le roi. En 2017, malade et marqué par la mort de sa femme, Michel s’en alla rejoindre ses ancêtres. 📷
Vivant maintenant dans une république, les roumains ont toujours gardé un certain attachement à la monarchie et il ne serait pas étonnant de revoir un jour un roi ou plutôt une reine car c’est désormais la fille de Michel 1er, Margareta de Roumanie, qui est de nos jours gardienne de la couronne roumaine.
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